Odysseus, "se battre dans l'ombre".

Je me doutais que j'allais revenir traquer ces fameux grands brochets. Et décidément avec toutes ces pluies, le niveau ne cesse de faire le yoyo. Mais avec ce que j'ai observé depuis plusieurs années, je commence à avoir quelques "repères"...

Cette fois c'est le Revo Beast 41L qui reprend sa place sur la SG4. Avec son ratio lent (5,8/1 pour 68cm/tdm), il est idéal pour faire nager les swimbaits de manière réaliste. J'ai dernièrement fait l'acquisition d'un Tatula 300 HSL avec un ratio nettement supérieur (7,1/1 pour 95cm/tdm). Nous en reparlerons prochainement dans une série d'articles spécifiques...

Niveau coloris, voici ma base type pour une présentation de ces gros swimbaits :

- Un coloris naturel passe partout (le coloris tout venant, quitte à n'en avoir qu'un).

- Un coloris qui laisse passer la lumière, eau claire, forte luminosité mais pas que...

- Un coloris presque opaque, sombre et plus discret.

Avec ce dernier, je souhaite jouer sur son ombre ou ce qu'Arnaud Filleul (docteur en systématique et spécialiste de paléo-ichtyologie) a nommé "effet silhouette".

Je suis assez fan des coloris très flashys notamment avec les glidebaits, mais cette fois je cherche davantage à passer inaperçu. Les poissons visés sont des poissons ayant déjà croisés des leurres et pêchés du bord. Je veux donc jouer sur le fait de présenter une proie qui se croit hors d'atteinte par sa discrétion et provoquer une attaque sans réserve.

Damien disait déjà que dans certains cas on parvient à déclencher une attaque sur une silhouette, une forme qui se déplace. On va forcer le prédateur à attaquer davantage une ombre qu'une véritable proie.

Peu de temps après avoir commencé, j'ai le droit à une première attaque des plus acrobatiques. La zone s'y prêtait, tout était en place pour que cela fonctionne.

Le bougre m'aura fait une première attaque du tonnerre. Tonitruante. Tellement rapide que la moitié de son corps est sortie hors de l'eau... Le deuxième passage sera lui concrétisé.

Le coloris Satan Black est donc validé dans les conditions qui me semblaient optimales. Je vais donc poursuivre et après un poisson de 75/80 que je laisserai se décrocher seul comme un grand, je me fais cette fois intercepter différemment.

Je me revois lors de la touche... Ce mou dans la ligne typique : ne pas ferrer, ne pas ferrer et attendre l'IMPACT. A ce moment là, pendant le ferrage, le poisson est déjà en train de se débattre en surface. C'est un signe qui ne trompe pas des grands brochets rusés : le poisson a du attraper le leurre avec violence (les marques que je verrai après le combat confirmeront cette hypothèse) et comme je l'ai déjà observé avec les leurres durs, il a compris l'usurpation et recraché aussi rapidement que possible...

Le poisson arrive donc vers moi avec le leurre piqué sur et sous la mâchoire. Après deux ou trois rushs esquivés en débrayant, il n'y a plus qu'un seul triple qui tient tout juste sur le dessus. Il tentera bien de me planter le triple libéré dans la main en se retournant de manière violente mais il finira finalement par poser pour la traditionnelle photo...

Un souvenir de plus. Je me revois soufflant comme un bœuf pour garder mon calme et me saisir de ce rude combattant. Je revois cet animal me regardant avec son grand œil et grognant dans l'herbe jusqu'à ce que je le remette à l'eau. Quel animal fantastique. Quel prédateur surpuissant.

"Ils se cachent dans l'ombre" et c'est un coloris proche de cette "ombre" que je leur ai présenté. C'est finalement se comporter un peu comme eux : présenter une proie sûre d'elle qui utilise le maximum de possibilités pour passer inaperçue.

D'un autre côté, c'est aussi dans l'ombre que certains pêcheurs continuent d'opérer, tentant de faire passer des connaissances au regard d'expériences personnelles alors même que ce que l'on peut trouver sur le net ou ailleurs s'apparente parfois plus à du marketing.

Les années passent mais la volonté de transmission reste forte, avec la recherche de la compréhension comme seule ligne directrice.